Introduction
Suite à la demande d’organiser une introduction à l’anthropologie et un projet au Maroc avec la classe 12ème de l’école Michael de Strasbourg, j’ai contacté Jamila Hassoune, une libraire très active dans le domaine sociale que j’avais rencontrée en 2007. Elle s’est montrée intéressée et elle m’a mis en contact avec Abdellah Taibi, un jeune professeur d’anglais qui enseigne à Skoura, un village à l’est de Ouarzazate. C’est avec lui que j’ai poursuivi les démarches pour l’organisation d’un projet entre les jeunes de Skoura et la classe de Strasbourg.
Lors du voyage j’était accompagnée par Benjamin Bourgeois (professeur de mathématique et tuteur de la classe) et par Jolynn Hagwood (professeur d’anglais et tutrice de la classe). Cette dernière nous a rejoint le deux derniers semaines.
Du point de vue économique nous n’avons pas eu des financements extérieur. Tout le voyage (matériel et séjour) a été payé par les élèves, leur parents et les professeurs.
Cet rapport ce veut un rapport critique, chronologique et constructif.
Objectifs du projet
Tout ce projet est basé sur une série d’interrogations :
Où s'arrête la culture et où commence l'individualité? Que signifie "rencontrer" une autre personne?
Peut-on connaître une autre personne sans se connaître soi-même?
Loin des statistiques, comment développer une vision de l'être humain pour ce qu'il est?
à Le premier objectif était d’apprendre aux élèves à connaître l'autre, au delà des cultures et des distances, comprendre les relations humaines : permettre aux élèves de développer des outils pour connaître l'autre, et à travers l'autre, eux-mêmes.
L'idée était de créer un projet pour que les jeunes des deux côtés de la Méditerranée puissent se rencontrer lors d'une activité concrète.
En plus nous avons également pensé que la rencontre serait plus profonde si les élèves logeaient dans des familles marocaines de Skoura.
àUn des objectifs était aussi de rencontrer une ou plusieurs associations travaillant dans le domaine social.
àEnfin, pour rentrer les plus possible dans la position de l’anthropologue et pour prendre conscience des expériences vécues, nous avons demandé aux élèves de tenir un cahier de bord.
Déroulement
Marrakech
Nous avons passé une semaine a Marrakech avant de partir à Skoura. Les élèves ont pu y commencer à s’orienter dans la ville, les rythmes, le climat et ils ont commencé à rencontrer des gens.
Nous avons rencontré Jamila qui nous a parlé de ses projets et activités.
Grâce à Kalima Arbouche et Nadia Essaâdi (une professeur de français), nous avons rendu visite et animé deux classes du Collège Charif Idrissi.
Nous avons aussi visité l’ “Association Al Amane pour le développement”, où nous avons proposé une animation pour les enfants du quartier.
Pendant cette semaine nous avons été invité à Ghemat et nous avons visité l’actif Lycée Afghani et la salle multimédia « Espoir », grâce à Jamal Ould Ali et les jeunes avec qui il travail.
Pendant cette semaine les élèves ont été très enthousiastes et nous n’avions pas besoin de leur rappeler d’écrire dans leur carnet de bord, ils voulaient tout écrire. Ils posaient beaucoup de questions et ils partageaient leurs observations avec nous.
Skoura
Arrivée
Nous sommes arrivés le vendredi 16 au café CTM. Mohamed El Houkari, Abdellah et Amal nous ont rejoints.
Nous étions tous fatigués à cause du voyage montagneux (plus des problèmes intestinaux pour certains).
L’après-midi, nous avons visité le centre socioculturel et nous avons rencontré certains des jeunes marocains intéressés à participer aux activités.
Abdellah a présenté un programme fait à partir de mes propositions et des siennes qui m’avait envoyé le 15 octobre.
Le programme a été présenté mais la plus part des jeunes avait des horaires scolaires à cause lesquels ils ne pouvaient participer que très peu aux activités, contrairement aux attentes. Heureusement il y a eu le week-end et trois jour de grève. A cause de tout ça, nous avons du nous adapter et essayer de faire le possible dans les conditions existantes.
Activités :
Ice-breakers :
Il s’agissait des jeux de groupe et d’équipes, d’un brainstorming sur la France et sur le Maroc, des jeux pour se présenter. Les jeunes ont bien participé aux jeux proposés et cela a permis de commencer à créer des contacts entre eux.
Théâtre
Nous avons pu faire des exercices de théâtre que deux fois. Donc le projet initial de pouvoir présenter une pièce de théâtre n’a pas été réalisable.
Amal a proposé un texte que l’on aurait du travailler pendant les activités de théâtre mais ça n’a pas été possible à cause des horaires des élèves.
Au début nous avons cru que si on avait un lieu pour travailler avec les jeunes après 18h (heure de fermeture du Centre Socioculturel) nous aurions pu faire plus d’activités. Mais nous avons compris ensuite que les filles marocaines n’avaient pas pu participer après 18h.
Pendant les exercices nous avons crée une belle ambiance d’expression corporelle et vocale.
Activité sportive
Exercices avec Abdellah et football derrière le Centre Socioculturel.
L’activité a été apprécié même si la chaleur était forte. On a pu bien rigoler par le fait que nous étions assez nuls par rapport aux marocains.
Peinture sociale
Dessiner et après peindre des thèmes abstraits à deux ou trois en essayant de mélanger le plus possible les élèves.
Le résultat étaient des dessins harmonieux à quatre ou six mains. Après la plus part des élèves ont souligné que ce n’était pas toujours facile de communiquer à travers le dessin, avec le peinture c’était plus facile.
Nous avons aussi chanté tous ensemble « Lammabada », un chant arabo-andalus que j’avais appris aux étudiants français avant de partir, et le chant à souvent l’effet de réchauffer l’ambiance.
Plantation de 30 palmiers
Cette activité a été l’activité la plus aimé par les jeunes français : ça a été un geste concrète vers le futur.
Nous avons planté les palmiers derrière le Centre Socioculturel. Nous étions divisés par petites équipes mixtes et nous avons suivi les instructions pour bien planter les jeunes palmiers.
Bracelets brésiliens
Les filles françaises et moi nous avons enseigné à tout le group à faire des bracelets. L’activité s’est bien passée. Nous étions divisés en petit groupes.
« Tissage »
Les jeunes marocains étaient tous à l’école à part Mouna et Hanna.
Mouna nous a enseigné une technique de travail avec des fils et un cadre en bois avec des clous.
Visite à la Kasbah Amridil
Vu que les étudiants étaient à l’école nous avons été visités la Kasbah Amidrill avec Abdellah e Abdelkhader (un autre professeur d’anglais). Deux filles marocaines nous ont rejoints en vélo pour une heure. Les jeunes ont bien aimé et ils ont dessiné des détails de la kasbah.
Fabrication de bolas
Nous avons fabriqué des bolas (outils de jonglerie) en petit groups et après ceux qui connaissaient la technique ont appris aux autres quelques gestes.
Certains garçons marocains ont dit que c’était une pratique trop féminine. Cette activité aussi n’a pas pu être continué comme souhaité par manque de temps disponible de la part des élèves marocains (pour ceux qui souhaitaient apprendre plus).
Echange culinaire
Grâce à cette activité nous avons mangé un très bon cous-cous, mais ce n’était pas facile d’impliquer les élèves dans la préparation. De notre part nous avons essayé de préparer quelque chose mais pour une prochaine fois il faudrait s’organiser en avance et soit faire des courses à Ouarzazate, soit trouver un four disponible.
Jeux de cartes au café
La dernière semaine les jeunes se sont retrouvé au café CTM et ils ont beaucoup joué à des jeux de cartes. C’était un bon moyen pour qu’ils puissent rester entre eux sans les professeurs et se connaître mieu.
Visite a l’association de poterie Oulad Laarbia
(Coordination avec : April Khoury
Ça c’est très bien passé. Nous avons pu nous promener dans la palmeraie et nous avons pu percevoir l’ampleur de l’oasis et donc mieux nous situer géographiquement. Ensuite nous avons visité une association de poterie, en vitesse, mais le clou de la sortie a été le repas et l’après-midi dans la famille d’accueil de April (peace corp).
Là-bas nous avons très bien mangé et après nous avons chanté et dansé avec eux.
Pendant cette sortie il y a eu aussi une discussion provoquée par le fait que certains jeunes marocains ont jeté des ordures par terre. Les jeunes français étaient assez choqué et certains ont eu une forte réaction. Ça a été l’occasion pour que ils en parlent entre eux. Nous en avons parlé avec les élèves français et nous avons souligné que chez nous, nous aussi nous polluons beaucoup même si c’est moins visible. Pour une prochaine fois le thème de l’écologie ce serait très intéressant à développer. Autre que le problème des ordures, dans la région de Skoura il y a le problème de l’érosion et de la disparition progressive d’une partie de la palmeraie.
Sortie à Sidi Flah
Vu que les élèves étaient à l’école nous avons organisé, grâce à notre hôte Aziz (de l’auberge Les Nomades) , une sortie à Sidi Flah et nous avons dormi une nuit au début de l’oasis dans une tente berbère (150 dirham par personne).
Il s’agit d’un lieu vraiment très beau où il y a une riche rivière. A l’allée nous avons marché à pieds pendant 10 km environs et deux dromadaires conduits par Mohamed ont porté la tente. Au retour nous avons pu monter 2 à la fois sur le dromadaire.
Ça a été une surprise que nous avons fait aux étudiants et ils étaient très contents. Je pense que ce serait très chouette de pouvoir organiser des balades aussi avec les élèves marocains dans cette région (même sans les dromadaires).
Peinture Murale au Collège de Skoura
Finalement Abdellah et Amal ont réussi à avoir la permission pour faire de la peinture murale au collège de Skoura. Grâce à une autre grève les élèves ont pu participer assez nombreux. Le thème choisi été « les quatre éléments ». Le problème que nous avons perçu a été le manque de temps pour pouvoir faire une bonne réflexion et des exercices avant la peinture murale. Ça aurait pu être un projet d’ampleur qu’ on aurait réalisé sur plusieurs jours.
Cependant nous avons eu l’impression d’avoir contribué à rendre la court du collège plus colorée et accueillante. Il avait une bonne ambience et une bonne participation des élèves marocains.
Fête chez Aziz
Nous avons demandé à Aziz si nous pouvions faire une petite fête dans le salon de l’auberge. Nous avons acheté des desserts et nous avons pu passer environ deux heures ensemble le jeudi avant le départ. Je pense qu’il est important d’avoir un moment festif avant la conclusion. Ça a été un peu court pour pouvoir bien profiter de la bonne ambiance mais c’était très bien.
Conclusion et perspectives
-La rencontre souhaité entre les élèves a bien eu lieu.
A ce propos le départ a été très émouvant. Le jour avant et pendant les derniers heures les élèves s’échangeaient des cadeaux, ils s’écrivaient les un les autres dans leur cahiers, et certains ont pleuré. Je pense que tout ça c’est un bon indice du fait que une relation humaine et amicale a été développée. Ça c’était pour nous le but le plus important !
Cependant il y a eu une absence de réalisation d’amplitude, les activité rassemblaient plus à de l’occupation que à de la création commune.
A mon avis ce serait important : 1. d’avoir un ou deux projets d’ampleur pendant le séjour, au lieu d’une multitude d’activités ; 2. de laisser fréquemment des espace pour les élèves entre eux, pour des échanges et des projets sans professeurs.
Les élèves, de deux coté ils étaient frustrés de ne pas avoir pu beaucoup se voir et de pouvoir bien profiter du temps à disposition.
Pour ces raisons et pour faire un projet avec des activités quotidiennes, il faudrait le faire pendant les vacances des élèves marocains.
-Familles : c’était très positif pour les élèves d’être dans des familles, l’idéal étant qu’ils soient dans des familles des jeunes avec qui se déroulent les activités. C’était très gentil de la part des professeurs de se prendre en charge les élèves, vu aussi les problèmes relevés pour trouver des familles disponibles.
Socialisation : le début à Skoura n’était pas facile entre les jeunes. On pouvait voir que ils étaient assez introvertis de deux cotés. Les marocains se plaignaient que les français ne parlaient pas beaucoup et les français se palignaient que les marocains parlaient beaucoup en arabe entre eux et parfois ils pensaient qu’ils se moquaient d’eux. De notre coté nous avons essayé de les pousser à faire des efforts. Petit à petit, en particulier pendant les balades ils sont rentrés de plus en plus en contact, mais c’est seulement à la fine qu’ils commençaient à bien s’entendre et ils auraient voulu avoir plus de temps avec eux.
-Organisation et communication : la communication n’est pas toujours facile entre les organisateurs des deux groups. Un travail sérieux et profond est nécessaire avant la rencontre à fin que le moins des choses possibles restent indéterminées (voir les familles d’accueil et le programme).
On s’est rendu compte que toute une série de choses ont handicapé la rencontre et l’organisation : un certain climat de méfiance et de lourdeur à Skoura dû à son histoire (prison politique, enclave arabe dans une région berbère) et aux dégâts causé par le passage de l’association Renaître (financement des familles, présence de jeunes français en difficulté qui ont posé des problèmes…). Nous avons aussi remarqué que le professeurs, eux même ne sont pas très intégrés dans la société de Skoura.
-il s’est révélé important que les élèves français puissent bénéficier de temps libre et de quelques périodes où se retrouver entre eux.
-Langue : c’était très important que les élèves apprennent au moins des phrases de base en darija pour la vie quotidienne. Pour une autre fois ce serait souhaitable de créer plus d’échanges linguistiques.
-La découverte des environs a été aussi très importante et pourrait être plus développée. Selon nos élèves et nos observations, les sorties et les promenades ensembles ont été très bonnes pour mieux se connaître.
-Les élèves français ont été tout suite très enthousiastes à l’idée de pouvoir inviter des élèves marocains chez nous à Strasbourg. Etant nos élèves à la dernière année de leur scolarité, souhaitons qu’ils puissent venir en mars comme prévu. Pour que ça soit possible il faut commencer les démarches maintenant.
-Nous sommes aussi très contents des changements de nos élèves pendant ce séjour. Par exemple, à la toute fin nous avons demandé aux élèves d’exprimer des sentiments nouveaux qu’ils avaient ressentis pendant ce voyage. Un garçon a dit qu’il s’est senti renaître, une fille a dit que avant elle n’était pas du tout intéressé par le domaine sociale et que maintenant, grâce a des expériences concrètes, elle sentait un fort intérêt pour le social. Une autre elle a été très marquée par l’expérience de communication avec la « maman » de la famille où elle était, même si elles n’avaient pas une langue en commun.
Globalement ce voyage a été une réussite. Les rapports humains ont été riches et conviviaux, et je pense que nous avons tous grandement gagné en ouverture sur le monde et l’humanité. Nous espérons que des graines d’avenir ont été semées chez ces jeunes et que le futur en verra les fleurs et les fruits.
Merci à tous !
Francesca Cimino